Homélie de Mgr Vincent Dollmann
Tu nous appelles, Dieu notre Père, à célébrer la très sainte Cène où ton Fils unique, avant de se livrer lui-même à la mort, a voulu remettre à son Eglise le « sacrifice nouveau de l’Alliance éternelle ».
La prière d’ouverture utilise le terme sacrifice pour désigner l’eucharistie que le Christ a transmise à ses apôtres. Sacrifier signifie : « faire du sacré, placer quelque chose dans la sphère de Dieu ». Le terme désigne l’effort des hommes pour répondre à la prévenance et à l’amour de Dieu.
Au cours de l’Ancien Testament, Dieu a amené son peuple à entrer dans une conception toujours plus profonde du sacrifice. Si, pour commémorer la libération de l’Egypte, Dieu inspira à Moïse d’établir un sacrifice d’agneau, il ne cessa d’inviter le peuple, par les prophètes, à dépasser la forme extérieure du rite. Dieu révélait lentement qu’il désirait, ce que l’homme avait de plus précieux : son amour, un amour qui répondait à son Amour, un amour qui reconnaissait Dieu comme Père et les hommes comme frères.
Jésus le Fils bien aimé est venu répondre pleinement à l’Amour du Père. Par sa mort en croix, il a manifesté un amour qui allait jusqu’au bout, jusqu’à l’extrême de l’amour. A cette lumière, le lavement des pieds est un mime de la croix. Le vêtement que Jésus dépose et reprend révèle qu’il offre librement sa vie par amour et qu’il brisera les verrous de la mort.
Cette offrande du Christ se perpétue à travers les siècles dans l’eucharistie, c’est là nous dit saint Paul que nous proclamons « la mort et la résurrection du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne » (1Co 11,26).
A la messe, nous proclamons la mort du Seigneur et nous avons part à son sacrifice d’amour. Quand Jésus donne son Corps livré, son Sang versé, il se donne pour nous entraîner à notre tour dans le sacrifice d’amour, dans le don de soi.
On peut ainsi affirmer que si l’eucharistie est le sacrifice du Christ, elle est également le nôtre.
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La messe, mémorial du sacrifice du Christ, devient ainsi l’école du sacrifice d’amour du don de soi : « Si moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavés les pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds » (Jn 13,14).
L’engagement chrétien dans le monde ne se réduit pas à la philanthropie ou à l’humanitaire, il est don de soi à la suite du Christ, il est don d’amour qui attire vers le haut, vers la communion avec Dieu, Trinité d’amour.
Frères et sœurs, en entrant dans les fêtes du Triduum Pascal, puissions-nous redécouvrir le sens de l’eucharistie comme mémorial du sacrifice de la Croix. Elle nous donne de faire de toute notre vie une réponse à l’Amour de Dieu, un sacrifice d’amour à la suite et avec le Christ.
La prière d’ouverture qui désigne l’eucharistie comme le « sacrifice nouveau de l’Alliance éternelle », s’achève par cette demande : « Dieu notre Père […] Fais que nous recevions de ce repas, qui est le sacrement de l’amour du Christ, la charité et la vie ».
+ Vincent Dollmann
Archevêque de Cambrai