L’œcuménisme et l’unité des chrétiens.

Dossier "Grand angle" paru dans le numéro d'Eglise de Cambrai de janvier 2021

 

Au long de nos 2000 ans de christianisme, des évolutions se sont faites, des avatars aussi. Déjà entre les 12 apôtres, ce n’était pas toujours l’entente cordiale. Et des premiers chrétiens on aimait dire qu’ils n’avaient qu’un cœur et qu’une âme ». Mais cela n’a pas duré longtemps. Et, bien vite saint Paul a été obligé de rappeler le respect que l’on doit à chaque être humain, lors du repas du Seigneur, comme les différents organes du corps humain, tous dignes de respect.

Jésus a prié pour l’unité de ses disciples après lui : « Que tous soient un, comme toi Père tu es en moi et que je suis en toi, qu’ils soient aussi unis à nous afin que le monde croie que tu m’as envoyé » Jean 17, 21.

Deux grandes divisions du passé marquent encore notre actualité.

Le schisme d’Orient, en 1054, qui a sans doute tenu davantage à des problèmes de communication, de sensibilité et de susceptibilité, entre ceux qui se reconnaissent de Pierre et les orthodoxes qui se recommandent de son frère André.

La réforme protestante au XVI° siècle qui est à l’origine des luthériens, calvinistes, anglicans. Souvent ces divisions ont été autant politiques que religieuses, avec des actes de cruauté inouïs et réciproques : la prise et le massacre de Constantinople par la quatrième croisade, en 1204. Le massacre de la Saint Barthélemy en 1572 et ses 3 000 morts.

Par la suite, Henri IV par l’édit de Nantes accorda aux Protestants un statut légal en France. Mais le roi Louis XIV révoqua cet édit, en 1685, en obligeant 200 000 protestants à émigrer, ce qui explique que beaucoup se fixèrent à la frontière de la France d’alors, dans notre région du Cambrésis et de la Thiérache.

 

Depuis ce temps un mouvement de rapprochement a commencé à se dessiner,

En vue de dépasser les points de désaccord. Ce qui nous rassemble est plus grand que ce qui nous sépare : la foi en Dieu, au Christ mort et ressuscité, à l’Esprit, la parole de Dieu, les évangiles et la Bible. Et ce même évangile, nous sommes tous chargés de l’annoncer.
Le Conseil Œcuménique des Églises regroupe plus de 300 églises. Et l’Église catholique, sans y participer, y a des observateurs réguliers. Jean XXIII et le Concile Vatican II ont encouragé le dialogue entre églises différentes. Paul VI a rencontré le patriarche orthodoxe Athénagoras à Jérusalem en 1964 et s’est rendu au Conseil Œcuménique des Églises en 1969. Jean Paul II a écrit l’encyclique « Ut unum sint », qu’ils soient Un, et a rencontré le primat de l’église anglicane à Canterbury en 1982. Benoit XVI en bon théologien a encouragé l’accord de 1999 sur la doctrine de la justification. Et en fin 2020 vient de paraitre avec l’accord du pape François un vade-mecum œcuménique* pour sensibiliser les évêques à l’unité des chrétiens.

 

Nous nous rassemblons lors de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens.

Chaque année depuis 1933, du 18 au 25 janvier, entre la fête à l’époque de la chaire de Saint-Pierre à Rome et la fête de la conversion de Saint Paul sur le chemin de Damas. Dans la plupart des diocèses, dans une dizaine de lieux de notre diocèse de Cambrai, dans des églises, dans des temples, les chrétiens de toutes confessions se rassemblent, se visitent, prient et chantent ensemble. Une fois par an, c’est peu, mais c’est déjà ça.

 

Sans niveler et renier nos différences de doctrines.

  • Quelle place, quelle autorité tient la parole de Dieu, la Bible dans notre vie ?
  • Quelle place tiennent les saints, en particulier sainte Marie.
  • Quel lien de succession y a-t-il depuis Jésus, les apôtres, avec les papes, les évêques, les prêtres, les pasteurs, les fidèles ?
  • Quelle place a le pape ? (On a parlé des « parpaillots » et des « papistes » !)
  • Lors de la messe, la communion est-elle la présence réelle du Christ ou uniquement un souvenir ? Pourquoi un tabernacle ?
  • Peut-on communier à une messe orthodoxe ? À une célébration protestante ?
  • Le baptême des petits enfants. Pour les baptistes, le baptême est donné à un adulte mûri, conscient et volontaire. Un baptême de croyant. On ne baptise pas avant cela.
  • Les évangéliques ont une commission d’implantation d’églises nouvelles. Ils veulent créer un culte évangélique pour 10 000 personnes. Au lieu de 29 000 habitants actuellement et ils créent ainsi 35 nouvelles églises par an.
  • La place des femmes chez les uns et les autres.
  • Etc. C’est passionnant !

 

Nous sommes invités à ne pas avoir peur les uns des autres, mais à aller l’un vers l’autre.

À briser la glace, à nous comprendre, à faire ensemble un peu de chemin.

Cette année 2021 le thème de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens est la parole de Saint Jean 15, 1-17 : « Demeurez dans mon amour et vous porterez du fruit en abondance ». Elle est proposée par la communauté monastique de Grandchamp, en Suisse, qui regroupe une cinquantaine de femmes très diverses. Communauté fondée dans l’esprit de la communauté des frères de Taizé.

Demeurer dans l’amour de Dieu, c’est y habiter, y faire notre maison. Nous y vivons pour y accueillir les autres et spécialement les blessés de la vie. Non pas pour juger et repousser, mais pour qu’ils se reconstruisent grâce à cette hospitalité partagée.

Le vade-mecum œcuménique qui vient de paraitre encourage les évêques à veiller à des relations œcuméniques et il offre des suggestions concrètes pour nos diocèses.

En voici quelques-unes, parmi une vingtaine de propositions :

  • Instituer une commission œcuménique diocésaine.
  • Veiller à ce qu’existent dans les séminaires des cours obligatoires sur l’œcuménisme.
  • Prier régulièrement pour l’unité des chrétiens.
  • Identifier quels documents bilatéraux ont été déjà publiés entre l’Église catholique et les principales communautés chrétiennes présentes dans le diocèse.
  • Être à l’écoute et appuyer les initiatives pastorales des autres communautés chrétiennes.

Le cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, compare l’œcuménisme à un avion. Quand il démarre, quand il décolle, il fait beaucoup de bruit et vibre de partout. Ensuite c’est plus calme, mais il avance toujours. Même si on ne s’en rend pas compte. Et il ajoute : « Dans un monde blessé par les conflits, l’unité des chrétiens est un signe d’espérance. »

 

Quelques brèves.

  • Il a fallu plusieurs années pour changer 5 mots du Notre Père. Pour mettre d’accord les différentes confessions chrétiennes et tous les pays francophones du monde. Mais quel beau témoignage que de prier ensemble !
  • J’avais visité un membre de la communauté réformée de Maubeuge. Il allait très mal, semblait dans le coma et il est mort trois jours plus tard. Il m’a juste dit : « Pourquoi censurez-vous le Notre Père ? » Il m’avait très bien reconnu et faisait allusion à la place de la doxologie du Notre Père dans notre liturgie.
  • C’est instructif d’aller chez les uns et chez les autres, à l’église orthodoxe, au temple, à l’église catholique. Visiter avec les enfants, des jeunes ou des adultes. Et leur expliquer que l’ordonnance des lieux exprime notre théologie.
  • Au cours d’un repas, j’étais à la même table qu’un frère de Taizé. Quand je lui ai demandé si au départ il était catholique ou protestant, il m’a fort aimablement répondu que ma question n’avait aucun sens !
  • À Douai, la célébration du vendredi saint, donc sans eucharistie, est toujours vécue entre chrétiens de plusieurs confessions.
  • En prison, le colis de Noël est très souvent réalisé avec le concours des différentes aumôneries et œuvres caritatives ; elles se répartissent les denrées que chacune va apporter.
  • À Valenciennes, à Douai, ailleurs un groupe partage chaque mois la parole de Dieu.
  • Et tant d’autres faits positifs que chacun pourrait ajouter.

 

Du pape François l’encyclique Fratelli tutti, en 2020 :

« L’Église valorise l’action de Dieu dans les autres religions et ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui reflètent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes ». § 277.

Abbé Jean-Marie Telle

Délégué diocésain de la Pastorale oecuménique

Le site de référence  www.unitedeschretiens.fr

Vademecum œcuménique à retrouver sur ce lien : http://www.christianunity.va/content/dam/unitacristiani/Documentazione%20generale/2020Vademecum/Vademecum-FR.pdf 

Article publié par Service communication • Publié le Mardi 23 mars 2021 - 12h17 • 1287 visites

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